Le dimanche. Merveilleux jour qu'est le dimanche. Pas de travail. D'heure à rester derrière un comptoir à servir à des ivrognes des boissons qui les feront plonger un peu plus profond dans leur mal être. Ils boivent parce qu'ils vont mal. Ils vont mal parce qu'ils boivent. C'est un cercle vicieux, le même que dans lequel tu te trouves. Chaque jour tu te lèves en rêvant d'un jour meilleur. En espérant de tout ton cœur que je ne serais plus là dans les jours à venir. Mais au fond, une partie de toi ne se voile pas la face, une partie de toi sait que je ne te quitterais pas avant de t'avoir bousillé, toi, ton père et ta charmante petite fille. Elle est si mignonne. Les hommes que tu sers pendant ton service sont dans le même cas que toi. Ils ont un démon qui les rongent de l'intérieur, la boisson les tue tous, peu à peu. Elle fait en sorte qu'ils se sentent mieux un instant, et le jour d'après, elle en demande plus, toujours plus. Comme les femmes. Tu sais de quoi je parle n'est-ce pas. Au fond, tu me fais un peu de peine parfois. Je commence à bien t'aimer petit insecte. Cela me donne presque envie de te laisser en paix pour la soirée, presque. Ce soir, tu as décidé de te détendre. Tu es passé chez ton père pour lui demander de prendre soin de Lisana. Tu aurais aimé la garder avec toi pour la soirée, te mettre devant un Walt Disney en serrant ta puce dans tes bras. Malheureusement tu as trop peur pour ça. Tu as peur de toi même. Tu sens quand je vais faire surface. Tu as une petite intuition qui te dis que d'un moment à l'autre je pourrais arriver et m'en prendre à ton trésor. Pour cela tu as tout prévu, tu as demandé à ton père de ne surtout pas te laisser rentrer chez lui durant trois jours. Au cas où je voudrais vous faire une petite farce. Que c'est tentant. Mais tu es un égoïste Isaac. Tu protèges ta fille, mais tu oses mettre la vie de ta meilleure amie en danger ? Je pourrais arriver à tout moment et m'en prendre à elle. Sa vie t'importe si peu que ça ? Pathétique mon chéri. Tu ne l'as même pas prévenu de ton arrivé. Et si elle est occupée ? Si elle est dans les bras d'un homme. Tu sais, le monde entier ne fait pas abstinence comme tu le fais. D'ailleurs, cela pourrait te faire du bien d'aller voir quelqu'un pour une nuit. Changement de programme, ne va pas chez ton amie, va plutôt voir l'homme que tu zieutais discrètement tout à l'heure.

Mais tu es borné mon pauvre. Encore chez ton père. Tenant ta fille dans tes bras. Tu ne peux pas t'empêcher de faire ce cinéma à chaque fois que tu la quitte. Ce n'est que pour quelques jours et pourtant tu as l'impression de partir loin d'elle pour toujours. C'est pour ça que tu vas voir ton amie ce soir. Elle est l'une des seule personne sur cette terre à pouvoir te remonter le moral lorsque tu es loin de ta puce. Relâchant enfin la petite, tu te redresses pour faire face à ton père. « Tu la couches pas trop tard, hein. Pas de friandise ni de boisson gazeuse avant d'aller au lit. Tu penses à bien lui brosser les dents. Pas d'histoire d'horreur. Pense à lui faire faire ses devoirs. Elle a pas le droit de trop regarder la télé, elle a école demain. » « Et respirer, elle a le droit ? » Tu lèves les yeux au ciel. C'est vrai que tu y vas peut-être un peu fort, mais tu ne peux pas t'en empêcher. Tu n'aimes pas la laisser. « J'ai compris le message, je m'en vais. » Te penchant, tu embrasses le front de ta fille en souriant. « A très vite ma puce, et tu obéis à grand-père. » Elle hoche la tête, tu souris, puis tu t'en vas.

Après avoir fais le trajet jusque chez ton amie à pied, tu es enfin arrivé devant sa porte. Un dvd dans une main, des friandises dans l'autre. Tu aimes passer des soirées avec Isibeal, vous restez devant la télé, à vous goinfrer et à vous raconter vos vie merdique. C'est beau l'amitié. Ayant les deux mains prises, tu te dis que ce n'est pas la peine de frapper, elle te dirait d'entrer de toute manière. Tu actionnes alors la poignet avec ton coude et entre comme si t'étais chez toi. Balançant le sachet de cochonnerie sur la table tu souris en t'avançant. « Si tu as quelque chose de prévu pour la soirée, décommande tout de suite. Ce soir on va regarder Frodon chercher sa putain de tour pendant neuve heures. J'ai pris les trois dvd !  » Regardant autour de toi, tu vois enfin ton amie et marche vers elle en lui tendant les films. Tu ne les aimes pas ses films. Mais tu adores te foutre de ce genre de film, tu adores te moquer de ces petits hobbits. « Si t'es gentille, on regardera même les bonus. » Tu lui fais alors un grand sourire. Un grand niais. Ce que tu peux être con quand tu es en compagnie de cette femme. Pire que d'habitude. Et le pire dans tout ça, c'est qu'elle l'est autant que toi. On dirait deux gamins dans une école maternelle. Au fond, t'es même pire que ta fille, c'est pour ça que tu t'entends si bien avec elle.

Isibeal n'eu pas à lever les yeux pour savoir de qui il s'agissait. Cela ne pouvait être que toi. Tu es le seul à oser entrer chez les gens normaux sans frapper et faire comme chez toi. « Bonjour, Isaac. Ça va bien, merci, et toi ? » Elle était sûrement occupée avant ton arrivé, et tu vois bien qu'elle était en train de dessiner. Mais tu n'eu pas le temps de voir son oeuvre d'art qu'elle te l'enlève de sous les yeux pour aller la placer. Tant pis. « Et franchement, je me serais passée du Seigneur des Anneaux. Tu sais parfaitement que j'adore ce genre de films. On risque encore de s'engueuler pendant la soirée, tu en as conscience, de ça ? » Elle marquait un point là. Vous n'aviez pas les mêmes goûts pour tout. Et si toi cela te gonfle de voir des petits hommes poilus des pieds marchaient pendant des siècles pour aller détruire une simple bague en toc dans une tour, elle aimait cela. Mais vous viviez avec vos différence. Au moins, vous vous complétiez. Ce n'est pas bon de trop ressembler à une personne. Les différences nous permettent de ne jamais nous lasser l'un de l'autre, dans la vie en générale. Voyant Isibeal prendre le téléphone, tu compris bien vite qu'elle allait commander des pizzas. Elle connait tes goûts, elle sait ce que tu prends à chaque fois. Elle t'en commande deux, oui, tu es gourmand. Se rapprochant de toi, elle te saute au cou pour te serrer contre elle. Te faisant ensuite une bise bruyante, elle te dit toute souriante. « Je suis contente de te voir, quand même. » Heureusement. Le contraire t'aurais bien embêté.

La serrant dans tes bras encore un moment, tu embrasses doucement sa joue. Cette femme, tu l'aimais beaucoup. Elle est comme la sœur que tu n'as jamais eu, et tu la protèges comme si elle faisait partit de ta famille. Mais vous vous connaissez depuis si longtemps, que pour toi, elle est de ta famille. « Enfin... Tu veux vraiment regarder les Hobbits ? Parce que j'ai Twilight, aussi, si tu veux te taper un délire à la con sur un film abominable.. » La relâchant, tu ne pus t'empêcher de laisser échapper un faible ricanement. Ce film, quelle pourriture. Au fond il est pas si mal que ça, Isaac, tu ne sais pas apprécier les bonnes chose. Jacob est pas mal sans son tee-shirt. Ramassant le sachet que tu avais posé sur la table plus tôt, tu prends un bonbon pour le gober. Gosse et gourmand, cela me fait à une maxime populaire. Il y en a qui cumulent. « Je préfère encore qu'on me pende par les bijoux plutôt que voir cette merde. C'est mal saint en plus ! La meuf hésite entre un vampire et un loup. Cela revient à hésiter entre la nécrophilie et la zoophilie. » Mais que tu es con quand tu t'y mets. Remarque j'aurais pu la sortir celle-la, bien vu.

Marchant en direction de l'endroit fétiche où Isibeal aimait peindre, tu continue de manger comme un goinfre que tu es. Tu parcours l'espace des yeux. T'aimerais toi aussi avoir un talent comme elle. Etre habile de tes mains et ne pas briser tout ce que tu touches. Mais tu ne peux pas. Depuis que tu es né, tu es maladroit et tu passes ton temps à provoquer désastre sur désastre. Puis il y a tout de même un domaine dans lequel tu excelles. Les gosses. Tu es très fort pour t'entendre avec et tu sais leur parler. Surtout la tienne, ta chère fille. Tu es un excellent père, personne ne peut le nier. « Tu dessines toujours autant à ce que je vois. » Prenant une simple feuille en papier et un crayons, tu commences à griffonner. Tu dessines un hommes. Un trait en guise de corps. Deux autres pour les bras, pareil pour les jambes. Puis un rond pour faire la tête. Tu tends ensuite la feuille à Isibeal en souriant. « Tu peux le revendre aussi chers qu'un tableau de Pablo Picasso. »