Si tu ne sais pas porter ton péché, ce n'est pas la faute de ton péché : si tu renies ton péché, ce n'est pas toujours ton péché qui est indigne de toi, mais toi de lui.

Melech & Nevaeh

La possédée suivait docilement la personne qui l'avait engendrée. Elle avait le dos courbé, mauvaise habitude qu'elle avait prise à cause de sa taille plutôt grande et son visage reflétait une certaine crainte. Elle était effrayée par sa propre mère car cette dernière n'était pas tendre avec elle, on peut même dire qu'elle était carrément cruelle. Cela avait commencé depuis des années, bien avant la naissance de la petite Nevaeh car la femme avait méprisée cette enfant dès qu'elle avait appris qu'elle grandissait en elle. Oui, Nevaeh, l'image de son pire péchée, de son infidélité, de son adultère qu'elle devait supporter tous les jours. Mais comment pouvait-on aimer cette enfant se disait la stricte mère Swanson ? Oui, comment pouvait-on regarder son doux visage sans se dire que sans elle, sans son indésirable existence, son péché ne lui sauterait plus à la figure et qu'elle pourrait enfin l'oublier. La mère Swanson avait honte de penser ainsi mais c'était comme cela qu'elle le ressentait, c'était plus fort qu'elle et elle n'y pouvait rien. Elle avait honte d'avoir engendré une batarde. Et la pauvre Nevaeh n'en savait rien, elle pensait être une vraie Swanson avec une mère seulement un peu cruelle avec elle. Et "un peu" est tout de même très faible pour designer l'atroce comportement qu'avait sa mère envers elle. L'enfant suivait toujours la mère qui transportait dans son panier d'osier quelques fruits et légumes achetés chez les plus riches marchands du coin, eh oui être une Swanson lui permettait de nourrir sa famille avec des produits de qualités. Elles marchaient toutes les deux et un mètre de distance les séparait, la jeune femme n'osait pas s'approcher de sa mère, surtout pas, elle avait peur et la mère qui méprisait sa progéniture faisait un peu comme si Nevaeh n'existait pas. C'est en ouvrant la porte d'une boutique puis en y pénétrant un peu que la distance se cassa. La jeune femme se cogna contre sa mère quand celle-ci poussa un cri effaré avant de laisser tomber ses courses sur le sol. Nevaeh qui faillit tomber, se rattrapa de justesse en écrasant une tomate. « Mère ? Que ... que vous ... vous arrive-t-il ? » Finit-elle par bredouiller tandis qu'elle se hâtait de ramasser les courses que sa mère avait fait tomber. « Vous ! Mon dieu, pas une ride, pas un signe de vieillesse... » Après avoir tout remis dans le panier d'osier, c'est sans oser dire un mot qu'elle observa la scène. Sa mère s'adressait à un homme assez beau puis jeune, elle semblait être complètement folle, son visage exprimait une peur totale mêlée à de l'incompréhension. « Mére ... » Cette dernière se retourna vers avec une expression de mépris cette-fois. « Tais-toi. » L'obéissance était quelque chose qui faisait presque partie de la jeune femme qui se tût aussitôt avant de baisser la tête. « C'est à cause de vous que ... » Sa voix était acide, elle se retourna vers Nevaeh, la fixant du regard. « Que je suis obligée de me trimballer ce pêché... » Elle marmonna doucement. « Cette fille n'aurait pas dû exister.» Ajouta-t-elle les joues presque roses avant de partir en vitesse en arrachant le panier des mains de sa fille qui ne s'autorisa pas à la suivre choquée par la scène qu'elle venait de voir. Elle avait l'habitude de ce genre de propos mais pas devant les gens et puis, elle ne comprenait pas ce que sa mère venait de dire. Avait-elle rêvé ou sa génitrice l'avait bel et bien désignée comme un de ses péchés ? Cette idée la répugna, Nevaeh se considérait comme une bonne personne, peut-être que sa mère était juste folle au final ? Cette option semblait de plus en plus probable. Elle releva finalement la tête vers l’homme que sa mère  avait interpellé et remarqua qu’elle lui ressemblait, genre beaucoup.